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Hervé Salters, le touche-à-tout de General Elektriks

jeudi 3 mars 2016 à 12h51 par Hoggins!
"J'ai vraiment ce sentiment de ne pas totalement appartenir au monde autour de moi, mais de flotter au-dessus avec plaisir"
"J'ai vraiment ce sentiment de ne pas totalement appartenir au monde autour de moi, mais de flotter au-dessus avec plaisir"
© Ian Grandjean
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En tournée dans toute la France, General Elektriks, par la voix de son leader Hervé Salters nous a fait l'honneur de répondre à quelques questions. Et ô joie, le groupe spécialement formé pour la tournée de ce projet solo multi-instruments pose ses valises à Castres, le 10 mars au Bolegason.

Parisien, puis ayant déménagé à San Francisco, et enfin à Berlin, ne devrait-on pas vous appeler Hervé Salters (avec une vraie prononciation à l'américaine) ?
Effectivement, on devrait le prononcer [à l'anglaise], parce que mon père est britannique. Comme j'ai grandi à Paris, je suis tout-à-fait habitué à la prononciation française.
Partis en vacances avec ma femme Sarah à San Francisco, on est tombés totalement amoureux de la ville, et on a décidé d'aller y vivre. Ce n'est pas à la base un choix musical à proprement parler, même si beaucoup de cette musique de San Francisco m'influence directement, et même si par exemple quelqu'un comme Sly Stone vient de la région de San Francisco, et c'est un de mes artistes préférés des années 60-70... mais c'était davantage un choix de vie : tenter autre chose.
C'est la même chose pour Berlin, où on habite depuis trois ans maintenant. On a flashé sur cette ville, et on s'est dit "pourquoi pas ?", et voilà. On y a posé nos bagages.

Est-ce que ces lieux ont une influence sur la façon de créer ?
Absolument, même s'il est pour l'instant un peu difficile pour moi de définir précisément ce qui est berlinois dans ma musique avec ce nouvel album qui a été écrit et réalisé dans mon studio à Berlin : je manque encore du recul nécessaire, j'ai l'impression d'avoir toujours le nez dans le guidon.
En revanche, pour les disques que j'ai faits à San Francisco, pour moi c'est assez clair, et notamment tout un pan hip hop dans ma musique, puisque je pratique une espèce de mélange de genres : je prends des éléments de funk, de pop à l'ancienne façon The Beatles ou David Bowie, des éléments de musique électro... le hip hop se retrouve dans ma manière de programmer les rythmes. Et cet élément s'est renforcé du fait d'avoir habité aux États-Unis.
C'est un style musical que je connaissais peu. Mais une fois là-bas, je me suis mis à collaborer avec les membres du collectif Quannum Project, avec des noms comme DJ Shadow, Blackalicious, etc. Ces gens-là sont devenus ma famille d'accueil musicale, et de fait j'étais plongé dans ce "chaudron" de hip hop indépendant de la côte Ouest, et ça a renforcé cet élément-là dans ma musique de manière très claire.
Pour revenir sur Berlin, c'est une ville aimée et peuplée par beaucoup d'artistes, et peu chère : les artistes qui y habitent se soucient peu du commerce de l'art, ce qui leur permet d'exercer un art assez radical, sans concessions. C'est assez rafraîchissant et sain d'être entouré de gens comme ça. D'où un possible petit impact sur le dernier disque.

Vous avez collaboré sur une série produite par la chaîne Arte, nommée Paris, composé la musique originale et prêté votre voix à un personnage transgenre. On brouille les frontières ?
Pour cette série, j'avais enregistré des voix démo pour l'actrice qui jouait le personnage transgenre. Pendant le tournage, elle a chanté les chansons, et le metteur en scène, Gilles Bannier a trouvé plus étrange et intéressant de garder ma voix. Mais il n'y avait pas de volonté artistique en amont.
Faire de la musique sur images, c'est quelque chose qui m'intéresse beaucoup : la musique de films fait partie de mes influences. Je viens justement de faire une musique de film pour Arrêtez-moi là [sorti le 6 janvier 2016, NDLR] avec Reda Kateb et réalisé par Gilles Bannier. C'est quelque chose qui me plaît : très différent du travail sur album, sur un projet comme General Elektriks. Sur disque, je fais tout tout seul, et en tournée, les quatre musiciens du groupe se joignent à moi pour le live. Mais sur disque, je suis face à une page blanche quand je commence quelque chose, à la différence de l'image qui propose un "trampoline" d'inspiration, l'image justement. Et puis c'est une œuvre collaborative et une œuvre de commande, avec un cahier des charges à remplir, donc le travail est très différent. J'apprécierais peut-être un peu moins ce genre de limites si je n'avais pas un projet solo comme General Elektriks qui me sert de défouloir.

Une écrasante majorité de vos chansons est en anglais. Qu'est-ce qui vous pousse à utiliser l'anglais ?
La première raison, c'est que je suis biculturel de naissance, avec un père britannique et une mère française. J'ai toujours entendu l'anglais autour de moi. Ensuite, beaucoup de la musique que j'écoute est anglo-saxonne : la manière dont les textes se posent sur des mélodies est devenue une habitude. Et puis j'ai vécu douze ans à San Francisco, je parlais anglais tout le temps, entouré d'anglophones, et les textes viennent plus facilement en anglais.
Mais il y a aussi quelque chose de purement linguistique dans la langue anglaise, qui est une langue avec accents toniques. Pour prononcer correctement "banana" en anglais, il faut mettre l'accent au bon endroit, à la différence du français. Si vous ne le mettez pas au bon endroit, les gens ne vous comprennent pas, ou mal. Ce qui est bien, c'est qu'on peut accentuer certaines syllabes, et forcer le trait. Le Rock'n'Roll se prête vraiment à ça : chanter une mélodie, et l'appuyer, en mettant les syllabes accentuées au bon endroit au niveau de la métrique de la mélodie pour appuyer là où on veut. Et c'est plus compliqué en français, et à mes oreilles, il y a assez peu de gens qui ont réussi ce pari-là. Même si on pense à Serge Gainsbourg, Jacques Dutronc, Nino Ferrer qui ont fait des choses formidables, je pense que ça vient plus naturellement avec la langue anglaise grâce à ses accents.
Dans ma chanson Tu m'intringues en français, j'ai contourné le problème, je n'ai pas mis de mélodie, c'est juste parlé.

RADIOM a découvert General Elektriks avec Raid The Radio, un titre qui exhorte les auditeurs à prendre d'assaut les radios pour leur dire de changer de disque. Est-ce qu'il y a une volonté de changement ?
Je crois qu'il ne faut pas prendre cette chanson trop au sérieux. Même si ça part d'un constat qui est authentique, une lassitude de ma part en cherchant sur le cadran radiophonique une station où je vais entendre quelque chose qui me surprend... le morceau est né de là et de cette frustration. Mais je n'ai pas non plus la velléité de changer quoi que ce soit avec ce morceau.
Ceci dit, le fait d'être face à quelque chose de différent, c'est important pour moi dans ma musique. Je ne sais pas si c'est ce que je suscite, mais en tout cas quand j'entends quelque chose qui me prend par surprise, c'est là que je me sens vivre mieux, avec l'impression de passer un moment "exponentiel". Je sors de ma zone de confort et de mes chaussons musicaux habituels. J'essaye à ma manière de faire ça avec ma musique, quelque chose d'un petit peu moins commun.
Mais ce n'est pas la vraie raison pour faire de la musique. J'ai commencé ce projet comme un défouloir dans lequel je ne voulais pas me donner de limite, et j'y mets exactement ce que j'ai envie d'y mettre sans réfléchir en termes de marché, ou en anticipant dans quelle case je serai rangé, ou quelle radio le passera. C'est la musique que j'ai envie de faire quand je me lève le matin, sans la prétention de faire de la musique pour réécrire l'Histoire du Rock ou pour la postérité.

C'est justement dans un environnement contraint que vous avez fait vos armes, à commencer par le travail comme claviériste pour -M- et son album "Le Baptême". C'est important, d'avoir une bonne technicité pour que ça marche ?
Il y a des exemples dans les deux cas. Par exemple il y a un type fabuleux appelé Thundercat, bassiste virtuose qui joue avec beaucoup de gens comme Kendrick Lamar, et il fait aussi ses disques solo et c'est très chouette.
D'autres personnes sont un peu limitées techniquement sur leur instrument ou leurs capacités musicales et font quand même quelque chose de sensationnel : je ne pense pas que la technique ou le savoir musical soient des choses vraiment essentielles pour obtenir un résultat lumineux pour les gens qui l'écoutent. Par exemple, les Velvet Underground ont justement amené l'esthétique inverse avec ce côté un peu gauche qui a eu une influence gigantesque et retentissante sur tout ce qui est devenu le rock indépendant depuis.

Cet album s'appelle "To Be A Stranger", vous vous sentez un étranger ?
Oui, tout simplement. Déjà depuis que j'ai déménagé à San Francisco en 1999, et que je n'habite plus en France. J'adore revenir en France à chaque fois, mais j'ai cette sensation de ne plus vraiment appartenir nulle part, et en même temps d'appartenir partout, comme une sorte de nomade. C'est quelque chose qui se fait de plus en plus.
J'ai d'autant plus cette sensation depuis qu'on est à Berlin, avec cette nouvelle langue qu'il faut s'approprier, et avec une culture anglo-saxonne moins prégnante qu'aux États-Unis. J'ai vraiment ce sentiment de ne pas totalement appartenir au monde autour de moi, mais de flotter au-dessus avec plaisir : même s'il y a peut-être une petite nostalgie dedans, ce n'est pas un constat triste.

Propos recueillis par téléphone le 3 mars 2016

Hervé Salters, le touche-à-tout de General Elektriks

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Plus d'infos :
- General Elektriks au Bolegason
- L'événement sur Facebook

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Si tu es animateur, tu peux t'identifier pour éviter d'avoir à remplir tout ça.


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Sur RADIOM.fr, on en a un peu marre des commentaires qui te vendent des pilules pour les messieurs complexés par leur masculinité. Alors on met des vérifications un peu nulles, mais au moins, personne n'essaye de nous vendre des trucs tout pourris. Alors désolé, mais il faut que tu remplisses ça :

Pour vérifier que tu es bien humain(e), réponds à cette simple question : combien font onzzzzz plus douzzzzz ? Évidemment, tu as le droit à la calculatrice.
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